Sword of Destiny
.
La vaste écurie du château tombait en ruine depuis plusieurs années. Faute de moyens la famille ne possédait plus de cheval et puisqu’avec la perte d’influence les Tries avaient aussi perdus bien des contacts, les voyages et les courses se faisaient de toute façon rares. Pendant un temps le bâtiment avait servi de remise pour la paille qui finissait par pourrir après chaque averses, l’eau s’infiltrant par le toit délabré. Elle était donc désormais abandonnée aux éléments qui s’acharnaient sur la construction qui ne devrait pas tenir debout bien plus qu’encore quelques années.
Que le Hurlement du loup les nuits de pleines lune parviennent aux oreilles des résidents était chose commune aussi ce n’est pas cet appel lointain qui déstabilisait l’homme robuste. Ne sachant plus très bien ce qu’il faisait dehors à une heure de la nuit si tardive, comme on se déplace d’une pièce à l’autre dans un but précis pour finir par ne plus avoir ce que l’on cherche une fois sur place, il se laissa simplement guider par une lumière vive et bleuté qu’il apercevait par l’interstice entre deux planches de bois qui s’éloignaient l’une de l’autres, et se dirigea vers l’entrée de l’écurie supposément déserte.
Poussant devant lui la lourde porte qui fit grand bruit en pivotant dans ses gonds rouillés, il porta une main à ses yeux à peine entré à l’intérieur, aveuglé par la lumière qui l’avait attiré ici. Le temps que sa vision s’accommode a ce changement soudain, il distingua petit à petit l’endroit d’où émanait ce rayonnement inhabituel: Un objet planté droit comme un I dans une vieille dalle de pierre à l’endroit ou on ferrait autrefois les chevaux pour protéger le sol en terre malléable du piétinement incessant des animaux.
Quelque pas de plus en sa direction, et à travers l’écran de particules de poussières réfléchissant la lumière comme d’innombrables lucioles, il la voyait presque nettement.
-
MaugrimIl n’avait fait que murmuré de sa voix grave mais c’est comme si sa voix avait invoqué le vend du nord jusque dans ce qui s’apparentais aujourd’hui à une grange, refermant la porte avec force, le bousculant imperceptiblement au passage et faisant voler les pans de la tunique dont il était vêtu.
Son père aimait éduquer ses enfants à l’histoire de la famille et plus particulièrement la légende qui avait vu naître leur blason, l’épisode durant lequel la famille acquis son titre de noblesse. Leur ancêtre Guillaume combattait aux cotés du Roi Philippe Ier lors de la défense du Vexin contre les incursions Vikings. Le Roi donna l’ordre d’établir une forteresse primitive qui fut le lieux d’une bataille mémorable au cours de laquelle le chef ennemi perdit la vie ainsi que son épée baptisée
Maugrim. Ayant défendu la vie du Roi avec un courage qui lui couta presque la vie, le monarque décida quelques temps plus tard d’anoblir Guillaume et de lui offrir pour terres le théâtre de ses faits d’armes, ainsi que l’épée au pommeau à la tête de loup du chef vaincu, et qui devint le trésor de la famille.
Dès qu’il fut en âge de s’entrainer et de jouer à l’épée en bois, il s’imaginait brandir l’épée du chef terrassé par son aïeul. Avec l’âge, vint aussi le doute quand à l’existence d’un tel trésor de famille depuis perdu mais il ne posa pas la question à son père, car il y a des magies qu’il n’est pas nécessaire de chercher à dissiper.
Et pourtant ce soir l’épée était devant lui comme. Sans jamais l’avoir vu il l’avait reconnu avec certitude. Presque palpable, c’est en avançant la main vers la garde et en sentant le froid lui chatouiller le bout des doigts comme si l’arme avait été forgée dans un bloc de glacier qu’il pris conscience qu’il était en train de rêver. Cette conscience allait dissiper l’illusion et sentant les secondes fuir à grande vitesse, Mathieu s’empara de la lame de tout coeur, posant genoux à terre.
. .
17 MARS 1314
Mathieu de Trie ouvrit subitement les paupières.
L’Azur de son regard sembla se décristalliser, comme fondre au contact de la réalité pour laisser place à sa nuance habituelle, plus sombre de bleu Acier. Impossible de dire si cette sensation de froid avait un rapport avec la brûlure qui l’avait entièrement saisi lorsqu’il s’était emparé de Maugrim en rêve ou s’il était resté trop longtemps assoupi dans l’eau de bain dans laquelle il venait de mariner.
Au même moment entrait dans la pièce un personnage déplaisant auquel Mathieu n’aimait jamais avoir affaire. Le Valet - celui-ci, en particulier - se portait garant du respect l’étiquette à la cour, et jeta un regard désapprobateur à l’eau noircie par des ablutions dont l’invité du Palais qu’il avait à charge de rendre présentable avait visiblement plus que besoin. Il fit signe à Mathieu de se lever et de passer à la corvée suivante.
Levant les yeux aux ciel Mathieu de leva du bain révélant de longues cicatrices dans le dos, et s’enveloppa la taille du drap immaculé qui lui était destiné. Il alla ensuite rejoindre à reculons la chaise qu’on lui avait désigné. Ajustant son dos au dossier, le Chevalier profita du temps que prenait le barbier à assortir ses couteaux pour observer son environnement. La splendeur des pièces les plus privées du Palais de la Cité lui rappelait qu’il avait bel et bien quitté - au moins pour un temps - la vie nomade sur les routes de France. Il lui fallait toujours un temps d’adaptation pour se réhabiliter à la vie de tout les jours.
-
Quel est le problème avec ma barbe ? J’ai toujours pensé que cela ajoutais de la gravité à mon caractère.-
C’est le cas, au détriment de votre élégance. A la cour nous considérons que la barbe est déplaisante au regard. En particulier les barbes infestées de poux.Il marquait un point. Dans l’état dans lequel Mathieu s’était présenté à la cour pour son audience, il ne faisait nulle doute qu’il avait passé bien du temps loin de la cour certes, mais il faut croire ausi loin de toute forme de civilisation.
-
La guerre est un art moins délicat que celui d’assortir les couleurs.Cette remarque eu le dont de rétablir l’équilibre entre les deux hommes en rappelant au Valet que c’est le Chevalier qui allait être reçu en audience avec le Roi, et de rappeler au Chevalier que l’honneur qui lui était fait valait de passer un peu de temps en compagnie de cet irritable personnage qui espérait surement qu'il fut aussi simple de faire pousser des cheveux aux endroits où ce crâne était dégarni que de couper sa barbe hirsute.
La vie de cour est aux antipodes de la vie sauvage que mène le militaire en garnison, l’incarnation la plus aboutie d’un rituel minutieux qu’un monarque impose aux courtisans aussi bien qu’à lui-même. Nombreuses sont les personnes désireuses de s’entretenir avec le roi, mais peu d’entre elles y parviennent. En théorie tout particulier peut rencontrer le roi puisque nulle règle n’exige un statut social particulier ou une fortune personnelle pour obtenir une audience du roi de France. Mais en pratique la chose est rendue impossible car pour espérer obtenir du roi une audience, il est nécessaire soit d’être un intime, soit de connaître certains de ses proches pouvant introduire l’intéressé auprès de lui. Ainsi les particuliers reçus en audience jouissent tous d’un statut social élevé. Parmi eux des ducs, des comtes, des évêques, des cardinaux… Être reçu par le souverain constitue un grand privilège et l’entretien représente souvent l’espoir d’obtenir une faveur du roi. Quelle était le motif de l’audience accordée à Mathieu de Trie ? Le Valet qui avait la tâche ingrâte de frotter ce rustre sans l’espoir de le rendre présentable n’était pas le seul à se le demander. Il se murmurait partout que le charismatique et brillant militaire qu’était Mathieu de Trie était sur le point d’obtenir la charge du commandement des armées du Roi.
La barbe fraichement coupée, Mathieu remarqua alors qu’il se levait pour passer des vêtements qu’on débarrassait ses effets entassées dans un coin de la pièce. Une lingère s’en emparaient avec hâte dans le but d’aller les laver a grandes eaux à défaut de pouvoir les brûler comme elle l’aurait fait volontiers à en juger par la grimace qui retroussait la pointe de son nez. Peu de choses c’est vrai, sentent aussi mauvais qu’un soldat rentrant de garnison à part peut être le vend du nord quand il inonde tout Paris des effluves pestilentielles de la Voirie de Mautfaucon.
Son épée en revanche, n’avait pas lieu de quitter ses cotés. Etonné d’abord par la facilité avec laquelle la domestique venait de soulever l’arme de guerre avant de se souvenir que ces bras frêles étaient probablement habitués à porter de lourdes charges depuis longtemps, un claquement de la langue suffit ensuite pour que le regard de la jeune femme se tourne dans sa direction et croise les prunelles froides. Elle resta d’ailleurs immobile, son mouvement gelé sur place. Seul ses yeux effrayés roulaient rapidement de droite a gauche dans leur orbites allant du Valet a Mathieu et de Mathieu au Valet, ne sachant que faire. D’un coté elle avait reçue des ordres, de l’autre elle rêvait surement d’un feu de cheminée pour se remettre de ses émotions avant de raconter à ses collègues avides de ragots, sa rencontre avec ce jeune militaire dont la venue avait alimenté les bruits de couloirs depuis la veuille. Lorsque le Valet lui fit signe de reposer l’épée celle-ci s’exécuta si maladroitement que le métal lourd de l’arme chuta sur la table avec fracas, précipitant la sortie qui s’annonçait déjà hâtive de la jeune femme sous le sourire narquois de Mathieu qu’elle ne manqua pas de remarquer.
-
Vous voilà prêt.. . .
Mathieu avait été escorté jusqu’à la salle de descente du Palais royal afin d’attendre l’heure de son audience avec le Roi Philippe et il avait patienté un certain temps, ce qui lui laissa le loisir d’imaginer ce que le Roi avait à lui dire car contrairement à l’idée reçue, c’est le Roi en personne qui avait demandé à rencontrer Mathieu et ce dernier n’ignorait pas les rumeurs qui allaient bon train à son sujet. Allait il effectivement recevoir de son souverain l’honneur d’obtenir le commandement des armées Capétiennes dans quelconque province ? Il essayait en vain de chasser cette idée de la tête pour ne pas s’attirer le mauvais oeil et patienta impassiblement aux cotés de son escorte.
Mathieu côtoyait le Roi depuis plusieures années, parfois de près, souvent de loin.
La grande famille de Chevalerie Française de Trie était de tout les osts, à une période où la chevalerie fermait ses portes pour un certain nombre de raisons et la branche de la famille de Mathieu de Trie avait fait les frais de chacune d’entre elles:
L’appauvrissement d’abord, du fait du partage des patrimoines lors de mariages arrangés dans le seul but de ne pas tomber dans la franche pauvreté. Le coup d’un équipement complet obligatoire de Chevalier et de sa monture étant hors de porté de financière, nécessitant les revenus agricoles de 150 hectares.
Les soupçons aussi: il est de plus en plus difficile de prouver son hérédité tant on soulève les tapis de chaque grande maison dans l’espoir d’y découvrir une imposture. Las de ces affaires toujours plus nombreuses portées devant le Parlement qui a d’autres chats à fouetter, Phillipe concède à la famille de Trie de Fontenay son titre de noblesse en délivrant une autorisation d’être armé Chevalier à Mathieu de Trie grâce à la faveur de Robert de Courtenay qui prendra en charge les frais d’équipement de son Champion. Les Prélats et Abbés sont pleinement engagés dans la hierachie féodale, prêtent hommage au Roi et lui doivent le service militaire même s’ils ne servent pas en personne. Ils recrutent alors des Chevalier pour servir sous leur bannière. Robert de Fontenay avait repéré le potentiel militaire de Mathieu très tôt et s’était donc assuré son bon service en plaidant fermement sa cause auprès du Roi qui ne regrettera pas une décision prise par lassitude.
Mathieu se démarqua si bien lors de la bataille de Courtrai que le souverain lui avait par la suite ordonné de servir aux cotés de Gaucher de Châtillon pour le restant de la Guerre espérant qu'il révèlerait tout son potentiel à son contact. Ce fut le cas et le connectable viendra à son tour à lui porter sa plus haute estime estime. Mais c’est lors de la dernière bataille de la guerre de flandres que Philippe le Bel s’entichera de Mathieu au point de le convier au pèlerinage à Notre Dame de Boulogne lors des célébrations de la victoire qui s’en suivi.
-
Mathieu de Trie, Sire de Vaumain et d’Airaines. Chevalier Banneret de Courtenay. Porteur d’Oriflamme.Mathieu se redressa du mur où il était adossé à l’annonce de son entrée dans la salle d’audience par le Valet à l'entrée.
Porteur d’Oriflamme. Au même titre que le connétable, les maréchaux et le maître des arbalétriers, tous forment ensemble une sorte d’état-major permanent susceptible en cas de besoin de mettre rapidement sur pied une armée en ordre de marche. Et tous font partie de l’Hôtel : ils entourent presque constamment le roi, y compris en temps de paix. Mathieu songeait souvent à quel point son père aurait été fier d'assister à l'ascension de son fils qu'il avait éduqué de tout coeur dans l'adversité.
L’Oriflamme avait littéralement échoué aux pieds de Mathieu sur le champ de bataille de Mons-en-Pévèle. Lors de laquelle, le vieux Chevalier Ansèleme de Chevreuse est mortellement blessé et s’effondre alors qu’il est à proximité immédiate du Roi ayant personnellement pris la tête de sa Chevalerie. L’Oriflamme porté par Ansèlme tombe alors également aux pieds du Roi horrifié à l’idée qu’il s’agisse d’un mauvais présage. Ayant observé la scène de loin, Mathieu arrive près du Roi au galop, descend de selle et sans un mot s’empare de la bannière avant de remonter sur son destrier, le faisant valser tout en portant haut et fort l’étendard de Saint Denis au dessus du Roi pour lui apporter soutiens moral avant de repartir à la charge des ennemis, la flamme sacrée claquant contre le vent. Mathieu avait officiellement reçu l’office depuis grâce à son refus de laisser tomber, l'Oriflamme, le Roi, la France et son armée.
Dans la salle était présents Philippe ainsi que son entourage habituel de conseillers et de ministres de tout bords de l’Etat. Y compris Robert de Courtenay que Mathieu revoyais pour la premièere fois depuis son retour à la cour et à qui il adressa une révérence discrète de la tête. La cour aussi était présente. L’audience avait effectivement lieu à la vue de tous les courtisans dont la présence finalement importait peu. Même si ceux-ci sont présents dans la pièce, le Roi et son invité sont généralement soigneusement laissés à l’écart afin que leur conversation demeure privé si besoin. Cependant de la manière dont le souverain accueilli Mathieu, leur conversation serait expédiée avant même que Mathieu ai l’occasion de pronnoncer le moindre mot. Bien que le Roi lui ai réservé un accueil à bras ouverts il s’était déjà levé de son trône et s’apprêtait à partir.
-
Mathieu de Trie. Veuillez vous joindre à nous tandis que nous quittons les lieux.Confus, Mathieu quitta alors la pièce dans laquelle il venait d’entrer sur les talons du Roi et de Robert de Courtenay lui aussi de la petite partie qui s’en allait à la suite de Philippe. Robert salua le retour de son protégé et l’informa ensuite que durant les audiences, on avait tenter de statuer sur le sort de Jacques de Molay. Le Roi n’avait pas encore de pris décision publique. Il lui apprit également qu’il ignorait les raisons pour lesquelles le Roi avait demandé sa présence aujourd’hui, tout comme il ne savait pas où ils se rendaient tous à présent.
Tout en écoutant Robert, Mathieu remarqua sans peine les regards qui lui étaient adressés de la part de ceux qui n'avaient pas étés conviés par le Roi à le suivre. Tous étaient curieux de la faveur à son encontre. Un plus amer que curieux appartenait à un Marechal du royaume et Conseiller du Roi arborant en écharpe les couleurs familières Or et Azur, mais à la bordure de gueules. Renaud de Trie était comte de Dammartin depuis la mort de son père dont Mathieu avait été l’écuyer. A ce titre, Mathieu avait terminé de grandir auprès de ses fils et il s’était lié d’amitié avec Jean plus particulièrement. Renaud quand à lui, fils ainé orgueilleux, avait été le seul à le regarder de haut et les choses ne s’étaient guère arrangées quand Mathieu avait été armé avant lui.
Renaud avait depuis été fait Chevalier du Roi, par le Roi, en même temps que les propres fils du souverain, et plus encore puisqu’il avait accéder au titre de Maréchal. Cela n'apaisa pas le mauvais caractère de Renaud, le ressentiment de ce dernier envers Mathieu ne faisant que grandir. Au décès de leur père Renaud avait été en conflit avec son frère Jean, le meilleur ami de Mathieu, au sujet de la succèssion des terres de Mouchy. Non seulement Renaud avait perdu le titre de propriété et de Seigneur de Mouchy au profit de Jean 4 ans plus tôt, il n’oubliait pas que Mathieu avait pris parti pour son frère à l’époque du procès. C’est sans doute pour cela qu’en tant que chef de la branche de Dammartin de la famille de Trie, Renaud avait choisi de destiner sa plus jeune soeur Aliénor au couvent Notre-Dame-la-Royale plutôt qu’au marriage fructueux que leur nom de famille lui aurait pourtant garanti, sous prétexte que la famille n'avait pas besoin de plus d'argent et qu'il était de bon ton de destiner un membre de chaque génération à l'église, et puisque tout les frères étaient militaire, Aliénor devait en assumer la tâche. La vérité étant qu'il ne supportait pas que sa soeur soit éperdument amoureuse de l’écuyer qui était un jour arrivé de nulle part pour servir son père, et qui menaçait aujourd'hui de le surpasser dans les grâces que le Roi leur accordait.
Soutenant le regard de son cousin aussi longtemps qu’il fut possible de le faire Mathieu se doutait que cet homme serait prêt à tout pour lui mettre des bâtons dans les roues avant de le laisser accéder au même degré de dignité auprès du Roi tel que la rumeur commençait à le pressentir. Si la carrière militaire de Mathieu ne dépendait que de lui, il le réduirait surement à la fonction d’archer à la garde d’un Gibet de potence pour empêcher les familles de venir récupérer les corps privés de sépulture de leur proches.
In your Heart shall
burn
. . . .
Le chemin depuis le Palais jusqu’à la destination inconnue fut beaucoup plus court que ce que Mathieu avait imaginé. On avait simplement traversé la Galerie des Merciers. Cette aile datant de Saint Louis servait à relier la Sainte-Chapelle aux appartements du Roi. A sa suite, on entra alors dans les lieux par une porte gardée.
Philipe avait en fait pris sa décision concernant le sort de Jacques de Molay et puisqu’il ne devait rendre de compte à personne, pas même au Pape, sinon à Dieu, il était venu prier la veille du châtiment qu'il prévoyait sur la pointe de l’île de la Cité.
Tandis que le souverain tardais à expliquer la raison de leur présence ici, Mathieu contemplait la magnificence de l’écrin monumental que Saint Louis avait ordonné afin d’y accueillir les reliques de la Passion du Christ. Plus habitué aux Chapelles de campagne qu’à la parure flamboyante d’un tel édifice religieux, il senti sa gorge se nouer. Que l’Homme soit capable de produire de tel Joyaux d’Architecture était selon lui la preuve que Dieu lui même insufflait l’inspiration à ses bâtisseur, une inspiration qu’on appelait la foi. La foi avait donné naissance à ce lieu hors du commun et Mathieu était reconnaissant d’avoir été invité à y pénétrer aux cotés de son Roi. Le souverain s’agenouilla d’ailleurs pour prier et pris enfin la parole à haute voix sous la voûte étoilée de fleurs de Lys.
"Seigneur, vous me connaissez en tant que pêcheur et je pense que vous avez déjà décidé de m’envoyer dans les ténèbres tel un ange déchu, pour y souffrir au Purgatoire ou dans les feus de l’Enfer pour l’éternité. Pensez-vous Seigneur que je puisse regarder ces scènes avec équanimité et que je ne rêve pas, dans le milieu de la nuit, de revenir à vôtre lumière et aux promesses du Ciel ? Ne suis-je pas un homme comme les autres ? Et pourtant, je souperais avec le Diable s'il me montrait comment atteindre mes objectifs terrestres. Votre royaume Seigneur, comme vous l'avez dit, n’est pas de ce monde. Mais mon royaume l’est."
Certains parmis l’audience restreinte se signèrent, d’autres se mordirent la lèvre dicrètement. Personne ne contredirait la décision prise par le Roi mais quoi qu’il ai réservé à Jacques de Molay pour le lendemain, ça puait la mort encore plus fort qu’aux abords du charnier du Cimetière des innocents. Mathieu lui-même adressa à voix basse son inquiétude à l’intention de Robert de Courtenay tout près de lui.
-
On dirait que je suis rentré à temps pour les festivités.- Spoiler:
A croire qu’il avait entendu son murmure, tout dans l’attitude de Philippe le Bel qui se redressait laissait croire qu’il en avait terminé mais un un signe de la tête en direction de Mathieu anonncait le contraire.
-
Autre chose. Mathieu se raidi pour prendre une position solennelle proche d’un garde à vous. Son monarque s'adressait enfin à lui et son instinct lui murmurait qu’il était sur le point d’en apprendre plus sur sa présence dans l’entourage privilégié du Roi ce soir, ce n’était pourtant ni le lieu ni le moment de lui conférer le commandement d’une province. Il espérait seulement que les honneurs s’arrêteraient en si bon chemin et qu’il ne serait pas convier à participer activement à la petite sauterie du lendemain. Philippe poursuivi alors.
-
Mathieu de Trie vous vous doutez que si je vous ai fait venir ici ce n’est pas pour que vous vous tourniez les pouces tandis que confesse mes pensées les plus intimes. Otez cet accoutrement définitivement risible sur un dos comme le vôtre, si le Valet a respecté ma directive vous portez en dessous une tunique blanche.C’était le cas, et il avait d’ailleurs hâte de retirer les vêtements inconfortables de courtisan. Seulement, il était peu être plus embarassant de devoir se dévêtir en public. Après quelques secondes d’hésitations Mathieu s’executa comme il executait chaque ordre reçu du Roi, défaisant la ceinture de cuir qui portait son épée à la taille et tendant celle-ci à un garde proche qui lui tendait déjà la main. Tandis qu’il se dévêtissait, le Roi continuait. On vennait de lui apporter un objet reconnaissable entre mille et que pourtant Mathieu mit un certain temps à intégrer. Le Roi attrapa l’épée par son fourreau vieilli et la dégaina.
-
J’ai appris de mon Jurisconsulte que ceci... Mathieu senti exploser son coeur.
...Appartient de droit à votre famille et plus encore depuis que vous la méritez. J’ai donc appris il y a peu qu’elle faisait partis du trésor Royal du Temple. Je l’en ai fait sortir et puisque je compte mener Jacque de molay au bûché demain et non au billot, elle vous appartient.En tunique blanche, Mathieu n’en croyait pas ses yeux. Comme le Roi lui tendis l’épée il avanca pour s’emparer de l’arme mais Philippe eu un mouvement de recul en souriant, ce qui était rare chez le Roi de Fer d’ordinaire aussi froid qu’une statue. Etais-ce une blague de mauvais goût ? Maugrim était elle apparue en cauchemar cette fois et l’assemblée réunie en la Sainte Chappelle allait elle dans quelques secondes rire aux éclats et Dieu lui même se moquait-il de ses rêves les plus précieux et intimes ?
-
Genoux à terre Mathieu de Trie Seigneur de Vaumain.L’heure de l'adoubement avait sonné pour Mathieu de Trie, de la main de Philippe le Bel en la Sainte Chapelle et avec Robert de Courtenay entre autres témoins. Mathieu prêta serment à La Couronne de France, à Philippe le Bel et à Robert de Courtenay. Sentant la lame de l’épée lui toucher l’épaule lorsque le Roi lui donna la collée, il reconnu le givre caractéristique de Maugrim qu’il avait ressenti lors de ses rêves les plus vivides, mais la certitude qu’il allait se réveiller d’une minute à l’autre n’était cette fois pas présente.
. . . . .
Tu croiras à tous les enseignements de l'Eglise et tu observeras ses commandements. Tu protègeras l’Eglise. Tu défendras tous les faibles. Tu aimeras le pays où tu es né. Tu ne fuiras jamais devant l’ennemi. Tu combattras les infidèles avec acharnement. Tu rempliras tes devoirs féodaux, à condition qu'ils ne soient pas contraires à la loi divine. Tu ne mentiras jamais et tu seras fidèle à ta parole. Tu seras libéral et généreux. Tu seras toujours le champion du droit et du bien contre l'injustice et le mal.